« Nous sommes tous des transhumanistes, depuis que notre vie est prolongée par les vaccins, les greffes, les prothèses de tous genres. Les choses ne sont pas rassurantes. C’est une force du marché lancée comme un TGV sans conducteur à 300 km/h. Rien ne l’arrêtera. Il s’agit d’utiliser la technologie pour modifier l’humain, contrecarrer la mort devenue une maladie comme une autre. Des plates-formes de séquençage du génome permettent de prédire les maladies génétiques. Le lobby en Californie, Chine et Corée n’a pas lu Kant et se moque de toute transcendance. Les avancées de la médecine ont mis fin à la sélection naturelle : elles ont des effets dysgénétiques parce qu’en vivant plus longtemps, nous transmettons davantage de mauvais gènes. Qui est en mesure d’imposer des limites ? Qui empêchera le marché de rétines artificielles HD, de puces qui rendent plus intelligents ? Un grand bricolage génétique a déjà eu lieu sur 89 embryons en Chine. Le transhumanisme n’est pas une option, nous y allons tous. Une modification du génome qui nous rendrait résistant aux virus aurait du sens si cela concerne toute la population, mais il y aura des SUR-modifiés et des SOUS-modifiés ! Pourquoi cette course folle à la technologie ? C’est notre immaturité qui nous a sauvés, notre capacité à lutter contre le déterminisme biologique. La culture est venue remplacer notre défaut de nature. Nous sommes la seule espèce à avoir découvert la mort et à pouvoir survivre partout. Nous entrons dans l’ère du biolithique, celle d’une hybridation entre le mécanique et l’humain. Quand on est raté à ce point là, poursuit Israël Nisand, on finit par y tenir, j’aime ma faiblesse. C’est par le langage que nous donnons de l’espérance à l’humanité. La fraternité provient d’un sentiment de manque, qui nourrit l’empathie. la faiblesse du malade oblige le médecin. N’opposons pas le principe moral à la situation concrète de détresse ! »
Propos recueillis par Christiane Schloesing
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