Libres propos

Réponse au « Courage des libertés » par Serge Soulié

©alain rey

Le texte intitulé le courage des libertés signé par 100 personnalités protestantes me parait au mieux être un coup d’épée dans l’eau, au pire un coup de canif notoire à la liberté telle qu’elle a été pratiquée dans les milieux protestants où j’ai été élevé. J’y ai appris que le protestantisme réformé s’intéressait au réel et au vécu quotidien à partir duquel chacun définissait les actions qui lui semblait les meilleures pour tous. Or avec ce texte nous nous trouvons devant un écrit politique et idéologique. Certes, qui ne serait pas attaché à la liberté de conscience ; qui ne peut ne pas croire à une force légale préventive, proportionnelle et transparente ; qui ne voudrait pas agir pour plus d’égalité, de solidarité et d’éducation ?

Se cacher derrière ces grands principes ne peut en aucun cas venir valider un texte à charge contre le gouvernement et contre la bonne volonté républicaine avec ses réussites, ses maladresses et ses échecs. Le pire est que l’ennemi des signataires n’est jamais nommément désigné sinon de manière tout à fait sournoise. Il aurait été plus sincère de dire clairement les manquements sous-entendus dans ces quelques lignes. On en serait ainsi venu à la réalité et à la vérité des choses. Elles auraient ainsi pu être discutées et améliorées. C’est heureusement ce qui se passe grâce aux contrepouvoirs mis en place par notre constitution et par les manifestations pacifiques, intelligentes et précises.

Ce qui est troublant dans ce manifeste c’est ce besoin de se réclamer du protestantisme et du clan des personnalités. J’étais habitué jusqu’ici à ce que ce soit plutôt les évangéliques qui se réclament d’une étiquette, celle de chrétien. Combien de fois ai-je entendu de leur part « je suis chrétien ». Je l’ai même vu écrit sur l’arrière d’une voiture qui m’a doublé sur une ligne blanche et m’a fait une queue de poisson. Non. Le protestant est d’abord un citoyen parmi les autres. Il ne choisit pas et ne définit pas ses actions en fonction de son protestantisme mais en fonction de ce qu’il juge bon ou mauvais pour l’humain et pour la création tout entière.

Enfin, ce texte aurait été plus crédible s’il avait mentionné ce qu’il conteste à savoir un encadrement sévère de l’islamisme avec le projet de loi sur le séparatisme  rebaptisée « loi confortant les principes républicains » et la loi « sécurité globale». L’utopie du texte aurait pu prendre en compte la nécessité pour l’islam de s’affranchir de certaines traditions pour à la fois rejeter les positions terrifiantes de l’islamisme et permettre à la religion musulmane d’exprimer  le meilleur d’elle-même. Il aurait aussi pu s’intéresser aux violences qui apparaissent dans toutes les manifestations dénaturant par ailleurs les objectifs visés. Habituellement les syndicats assuraient l’ordre au cours des manifs. La meilleure façon de régler les problèmes de la police est de permettre aux manifestants de s’exprimer sans violence. Les organisateurs doivent y participer énergiquement. Ils ont une grande responsabilité et doivent collaborer avec la police afin de  contrôler les éléments violents du côté des manifestants comme du côté des policiers.

Pour conclure, je dirai que ce texte à charge risque de nous placer dans une situation de complicité lors du prochain attentat. Il risque de nous mettre en position d’accusé lors des prochaines destructions de la manif à venir. Autrement dit, il ne nous aura pas conduit vers la liberté mais vers le désordre et l’insécurité qui sont les premiers ennemis de la liberté.

Serge Soulié

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Serge Soulié

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