Spiritualité Théologie

Prier…

C’est brusquement se mettre de plain-pied. On ne dialogue qu’avec celui qui est là et qui écoute. C’est au-delà du voile, être certain d’une présence au-delà du silence entendre une réponse. C’est affirmer d’un geste spontané un besoin de partage. C’est au sein de la nuit où l’on croit affirmer la lumière, où l’on sait.

Je ne sais quel acte de foi plus simple et plus complet. Peut-être n’y a-t-il pas de paroles, mais un simple réflexe, un mouvement presque instinctif. Mais il y a dans ce geste toute la foi d’un homme qui, souvent, croit ne pas croire, qui, souvent, n’en peut plus et se met à prier sans savoir même qu’il prie.

Prier n’est pas parler ; c’est un mouvement de tout l’être qui dure un éclair, ou se prolonge dans une angoisse, ou s’abîme dans une révolte s’endort dans une fatigue, ou se savoure dans l’action de grâces.

Prier c’est un appel ! On prie comme on s’appuie à une table pour ne pas tomber, comme on ferme les yeux pour ne pas être ébloui, comme s’endort de lassitude, comme s’apaise un enfant sur le sein de sa mère, comme retrouve la paix l’inquiet qui reconnait sa route. Les orgueilleux ne peuvent pas prier.

Prier c’est se savoir dépendant, recourir à plut fort que soi. Prier c’est le réflexe de l’homme qui perçoit ses limites, sa pauvreté, et mendie.

Prier c’est un réflexe d’amoureux qui n’en revient pas d’être aimé, d’être regardé avec amour, d’être préféré. Je vois bien que tu es belle et désirable, mais, tu sais, je ne vois pas ce qui en moi, peut te plaire je crois rêver ; tous les amoureux croient rêver.

Prier n’est pas forcément un moment que l’on consacre à Dieu ; c’est un état d’âme qui, parfois, n’affleure pas même à la conscience.

 Prier c’est comme respirer, comme dormir ; c’est être bien, être en sécurité sans-même, souvent penser à Dieu. On ne pense pas toujours au cœur qui bat.

Prier cela ressemble au bonheur d’être chez soi. La pluie tombe et je suis près du feu. Je ne songe pas au toit qui me protège, je suis simplement protégé par lui et absorbé par ma quiétude. Je ne songe pas au toit, il est normal qu’il y ait un toit i1 est normal que Dieu soit là. Je ne connais pas de plus bel acte de foi, de plus belles prières, que ‘d’être heureux parce qu’il est normal que Dieu soit là et nous protège.

Prier n’est pas forcément une mise en présence de Dieu ; c’est aussi, et le plus souvent, le toucher sans même le reconnaître : Marie-Madeleine et le jardinier, Pierre dans sa barque, le bon larron.

Prier, c’est contempler une humble fleur, mettre avec abandon sa main dans une main chercher avec tension à résoudre un problème et déjà pressentir la solution. Prier, c’est un certain poids de silence.

Prier, c’est aussi crier, tomber, de fatigue, savoir sa vie gâchée ou la voir vous quitter ; c’est constater un échec, être devant l’irréparable et dire à Dieu qu’on ne comprend-pas, et parfois même le dire avec révolte. Mais le dire à Dieu est un formidable acte de foi en sa présence et, comment lui dire, sans hurler, une détresse impossible à porter, une détresse qui ne peut s’exprimer que dans un cri. Tout autre chose qu’un cri sonnerait faux aux yeux de Dieu. Il ya a un temps pour la stupeur et un temps pour l’abandon : « Père, s’il est possible…Père pourquoi m’as-tu abandonné.? et après seulement      :

« Que ta volonté soit faite ! »

PrierQue nous sommes loin des formules et des mots !

Prier   c’est être vrai devant Dieu.

 

Charles H.  Maison d’arrêt de La Santé 1984

À propos de l'auteur

Jacques Gradt

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