Olivier Pigeaud : Bible et Religion(s), SMPP Éditions, www.editions-smpp.com, 2020, 63 p., 9,50 €.
Bravo à Olivier Pigeaud pour son incessante volonté de nourrir le débat théologique !
Avec ce petit opuscule, Olivier Pigeaud interroge les écrits bibliques sur la question de la religion. Il opère d’abord une distinction assez fondamentale entre les religions et la religion. Les religions sont des langages, des modes d’expression, des façons de dire sa foi. Les auteurs bibliques « ne s’étonnent pas que d’autres aient des croyances différentes », ils peuvent même entretenir avec les autres « païens » des relations paisibles, voire positives. La rencontre entre Abraham, le père des croyants, et Melkisédek, le prêtre païen, est à cet égard éloquente. Melkisédek est en effet le tout premier humain qui va bénir Abraham.
La religion quant à elle n’est pas un concept biblique. Le concept est malgré tout opérationnel car il permet de débusquer « ce qui privilégie les actions humaines par rapport à la Parole de Dieu, le rite par rapport au message, la tradition par rapport à l’événement, la forme par rapport au fond, l’institution par rapport à l’existentiel ». Pour construire son raisonnement, Olivier Pigeaud convoque successivement Durkheim, Kant, Hegel, Marx, Wilfred Monod, Barth, Vouga, le jésuite Joseph Moingt, Tillich, Bonhoeffer, Nietzche, le prophètes Amos et Ésaïe, les récits du Pentateuque et du Cantique des cantiques, les lettres de Paul.
Dans la troisième partie, Olivier Pigeaud s’interroge sur le dialogue interreligieux aujourd’hui et se demande comment « éviter de se laisser étouffer par le religieux envahissant ». Pour Olivier, le lecteur de la Bible dispose « grâce à la critique interne des textes eux-mêmes, un moyen remarquable d’autocritique bien nécessaire pour un dialogue de fond avec les autres communautés religieuses ». De plus, les textes bibliques nous renvoient à la double figure d’un « Jésus conteur sans pouvoir » et d’un « Jésus mangeur et buveur avec les marginaux ».
Thomas Römer signe la préface de cet ouvrage. Il en souligne le caractère stimulant : « Le mérite de l’ouvrage d’Olivier Pigeaud est d’analyser les données bibliques d’une manière claire et pédagogique et d’inviter ses lecteurs et lectrices entrer dans un débat qui nous est proposé par les textes bibliques, mais qui nous concerne aujourd’hui dans un contexte dans lequel certains voudraient revenir à la ségrégation alors que d’autres mettent en avant la nécessité de l’inclusion et de l’ouverture ».
Alain Rey
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