Éthique Théologie

Face aux défis anthropologiques de notre société, quelle espérance pour l’humain ?

Poser la question « Quelle espérance pour l’humai ? », c’est considérer que ces réalités sont devenues aujourd’hui problématiques, que des éléments constitutifs de notre humanité pourraient être interrogés et, demain, menacés. Encore faudrait-il, pour évaluer cela, se référer à une conception commune de l’humain. Or celui-ci ne se définit pas de façon abstraite, générale et unique, mais toujours en référence à une manière singulière de le comprendre, donc à un système particulier de convictions ou de valeurs. Cela ouvre à une diversité qui est non seulement inévitable, mais souhaitable. Car dès qu’une conception de l’humain est posée comme unique, absolue, s’imposant à tous, on voit poindre le risque du totalitarisme religieux ou idéologique. « Nous ne pouvons nous réconcilier avec la variété du genre humain et avec les différences entre les hommes, écrit Hannah Arendt, qu’en prenant conscience comme d’une grâce extraordinaire, du fait que ce sont les hommes et non l’homme qui habitent la terre »(1).  

La difficulté, par contre, c’est que ces anthropologies multiples ne sont pas toujours clairement posées, ni pensées. Elles fonctionnent alors de manière masquée et l’on en perçoit seulement les conséquences, à travers leurs retombées éthiques dans la réalité. Du coup, face aux défis qu’elles génèrent, on a tendance à répondre de manière morale, voire moralisatrice. On le voit quand les médias ou les pouvoirs publics demandent l’avis des religions sur telle question sociétale ou tel projet de loi, pour tenter de baliser le chemin au cœur d’attentes contradictoires, notamment dans le domaine de la bioéthique. C’est généralement sur ce mode binaire qu’ils les interrogent : êtes-vous pour ou contre, est-ce bien ou mal, interdit ou autorisé ? On peut alors être tenté de répondre sur ce registre éthique, parce que c’est le plus immédiatement accessible et compréhensible et donc aussi le plus gratifiant. 

Or ce qui est ici en jeu c’est d’abord de clarifier sa conception de l’humain et d’en rendre compte. Tâche autrement plus ardue que de prescrire une morale. Il ne s’agit pas ici de livrer des réponses toutes faites, mais déjà de bien poser les questions et signaler les enjeux pour l’humanité. Car si  « l’éthique n’est pas étrangère à l’Évangile, elle n’en est pas le cœur »(2). C’est donc d’abord une réflexion anthropologique que les chrétiens et les Églises devraient conduire en exposant leurs compréhensions de l’humain à la lumière de l’Évangile. Une démarche théologique critique qui, en s’inscrivant dans le débat public, requiert de chacun qu’il indique les sources anthropologiques auxquelles s’abreuvent ses propres choix éthiques. C’est ce que nous tenterons modestement de faire au cours de notre pastorale nationale, sous le signe de l’espérance.

Michel Bertrand

(1) Hannah Arendt, The Burden of Our Time, Londres, Secker and Warburg, 1951, p.438-439.

(2) Christian Duquoc, « Je crois en l’Église », in Précarité institutionnelle et Règne de Dieu, Paris, Le Cerf, 1999, p.292

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Alain Rey

Directeur de la publication Hier & Aujourd'hui
Pasteur de l'EPUdF
Études à Montpellier, Berkeley et Genève
Pasteur à Fleury-Mérogis, Mende, au Defap et à la Cevaa

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