Carnet Communauté

Dieu est là, Dieu silence, Dieu avec Martine…

Prédication d’Anne-Sophie Verseils-Dantan lors du culte d’action de grâce en hommage à Martine Millet, le 16 mars 2022, au Centre Huit :

 

Martine avait pleins d’amis, vous en étiez tous, de très proches, de plus lointains avec qui elle a partagé, ri, pleuré, conté, voyagé, manifesté, écrit, chanté, prié, discuté et refait, et l’église et le monde.

Mais, Martine avait aussi une autre catégorie d’amis dont elle aimait le compagnonnage…

Des hommes et des femmes venus la rejoindre à travers les pages de ce gros livre qu’on nomme La Bible.

Elle leur parlait, les faisait parler, les aimait, les interrogeait, marchait avec eux dans une quête jamais satisfaite, à la rencontre de Celui que l’on appelle Dieu.

Vous savez bien de qui je parle…

Ils sont nombreux : Jonas qui refuse, puis accepte, Marie qui s’étonne et chante, Judas qui trahi, Pierre qui renie et s’enfuit, Elisabeth qui attend en silence, Marthe qui s’inquiète, Jacob qui se bat, Ruth qui accompagne, et Moïse qui traverse et Abraham qui part et Sarah qui rit…….

La liste pourrait être très longue.

Ces hommes et ces femmes, Martine les aimait parce qu’ils cherchaient sans cesse, comme elle peut-être, à mieux connaître Dieu, à savoir comment faire avec lui, à apprendre comment se tenir devant lui, comment être juste avec lui et avec les autres.

Oui, une quête profonde, questionnante et questionnée, pour tenter à chaque rencontre, à chaque échange de découvrir le visage caché de Dieu.

Alors je vous propose aujourd’hui de suivre un de ces personnages, un ami très proche de Martine, peut-être son « grand ami », Elie.

Et nous allons le suivre et découvrir à travers lui quatre visages, quatre facettes de ce très grand ami de Martine, quatre visages proches aussi de celui de Martine…

Alors entrons maintenant dans ce voyage en compagnie d’Elie et de Martine.

Premier visage : Elie c’est avant tout un prophète…

C’est quoi un prophète ? Et bien c’est celui qui est appelé, envoyé par Dieu pour parler en son nom aux hommes et aux femmes,

Pour parler de quoi ? Mais de Dieu bien sûr ! Et aussi de ce que les hommes doivent faire ou ne pas faire pour vivre bien ensemble.

Finalement ça parait simple, mais ça ne l’est pas toujours !

Et c’est ce qu’Elie va faire, parler de Dieu ! Essayer de convaincre qu’il faut l’aimer, qu’Il est important, central même dans la vie, dans toute vie…Que c’est à lui qu’il faut donner du temps, que c’est lui qui aide à vivre malgré tous les obstacles.

Et c’est aussi ce que Martine  a fait, prêcher, interpréter, raconter Dieu, et aussi tenter d’expliquer, de convaincre …

Gigantesque travail, merveilleux ministère, parler à Dieu au nom des humains et parler aux humains au nom de Dieu.

Et pour Martine comme pour Elie, c’est parfois radical et sans demi-mesure, quand on y croit très fort, on ne fait pas toujours dans la nuance !

Il faut être efficace et ne pas se laisser impressionner !

Alors Elie, il y va, il veut des changements, il veut améliorer le monde, il veut tout réformer, les autres, les structures et les institutions. Il se met en colère, il y croit, pour Dieu !

Saisit par la main de Dieu, il somme même le peuple de faire son choix « jusqu’à quand danserez-vous d’un pied sur l’autre ? » leur dit-il sans les ménager.

Elie c’est un battant. Il lutte plein de zèle pour Dieu. Parfois ça marche et Elie sort gagnant, parfois c’est dur, très dur et Elie ne sait plus comment faire !

Il n’est pas toujours facile d’être le serviteur de Dieu etle serviteur des humains !

Premier visage, Dieu est là, dans la société, engagé avec des hommes et des femmes qu’il a appelés et envoyés.

Second visage : Elie l’altruiste, celui qui aime les autres

La première personne qui atteste le ministère du prophète, c’est une femme toute pauvre sans statut. Elle a vu son fils guérir d’une grave maladie. Elie lui a redonné souffle.

L’espérance redonnée, la vie qui revient, voilà aussi les signes du ministère d’Elie.

Il est alors le représentant d’un Dieu proche des petits, sensible à ce qui insignifiant aux yeux des puissants, un Dieu proche de la souffrance pour la soulager.

Il est envoyé à Sarepta pour y être nourri par une veuve, à bout de ressources, alors que suivant la loi, il n’avait pas le droit de manger avec des païens et qui plus est avec une femme !

Mais il transgresse et demande à manger.

La veuve lui offre ce qui lui reste, de la farine et de l’huile dont elle fait une galette et Elie lui promet qu’elle ne manquera jamais plus de rien.

Il se lèvera aussi, un autre jour pour défendre un petit du peuple, Naboth.

Dans ces moment-là,  la seule radicalité qui s’impose à Elie pour témoigner de Dieu, ne concerne pas les grands débats d’idées, ou les doctrines, mais l’urgence d’agir pour signifier l’amour de Dieu auprès des autres.

Voilà à nouveau une vraie proximité, fraternité qui se dessine entre Elie et Martine…

Etre là pour les autres, avec les plus fragiles, se battre à leurs côtés, les sans voix, les sans domiciles, les laissés pour compte, les exilés, les tout-seuls….

Second visage, Dieu est là, ami des petits et des souffrants.

Troisième visage : Elie seul et couché

Elie est menacé de mort, alors il part pour sauver sa vie, et il trouve refuge au désert.

Il mettra quarante jours et quarante nuits pour le traverser.

Il va prendre de la distance face aux évènements qu’il traverse. Il se retrouve seul, face à lui-même. Jusque-là il a utilisé toute son énergie pour l’activité extérieure. Et brusquement dans le désert il est confronté à son propre état intérieur. L’inquiétude projetée auparavant à l’extérieur et surmontée par l’action laisse place à ses propres angoisses qu’il doit aussi affronter.

Martine aimait partir, de longues balades en montagnes, des après-midi à écouter de la musique, des retraites chez ses petites sœurs, des voyages en Inde…Besoin de se recentrer, de s’apaiser, de prier, de se retrouver, d’être juste avec soi-même et avec Dieu…

Et alors qu’Elie est seul et désespéré, Dieu lui envoie un ange…

Elie est assis sous un genet, qui lui offre de l’ombre au creux de la chaleur du désert et l’ange pose la main sur lui, alors Elie se couche et s’endort.

Une galette et une cruche sont posées là en silence par l’ange qui cherche à le rassurer, à apaiser sa crainte.

Martine a été pour beaucoup comme cet ange, présente aux heures de grande détresse, pleine de tendresse et de délicatesse…

Elie avait aussi, peut-être, besoin de faire lui-même l’expérience du salut qu’il avait auparavant offerte aux autres ? Il devient maintenant, après ce temps de désert, pour lui-même le récepteur de la promesse de vie.

Voilà qu’après avoir fait tant de choses pour les autres, Elie accepte et laisse les choses se faire pour lui.

Troisième visage : Dieu est là, avec nous, Dieu douceur, Dieu tendresse

Quatrième visage : Elie qui écoute et qui est écouté

Et l’ange revient. Et le prophète couché se relève, c’est le verbe de la résurrection !

Il se lève et marche jusqu’à la montagne de Dieu. Là il passe la nuit dans une caverne.

C’est le lieu du refuge mais aussi le lieu du passage d’un stade à un autre, de la terre au ciel.

Et voilà qu’il entend alors une parole venue d’ailleurs

Pourquoi es-tu ici Elie ?

Quelqu’un se fait proche de lui et est prêt à l’écouter.

Sors tiens-toi sur la montagne devant le Seigneur.

La parole l’invite maintenant à sortir de lui et à se tourner vers l’Autre.

Il est invité à découvrir le secret de la divine présence.

Dans la suite, il y a le brusque passage des éléments déchainés, le vent, le tremblement de terre et le feu.

Mais Dieu n’y est pas présent.

Dieu renonce-t-il désormais à se révéler dans des signes éclatants ?

Elie lui est là, debout.

Et Dieu se révèle, il se révèle dans « la voix d’un fin silence » cette expression peut aussi se traduire par « un son plus subtil qu’un murmure tenu ».

Dieu se révèle dans une douceur inexprimable !

Le silence et le murmure de l’Horeb sont liés à la tendresse.

Et alors qu’Elie n’avait pas réagi au déchainement des éléments, voici que maintenant, il entend. Il écoute et se voile le visage avec son manteau.

Il sort et entend à nouveau une voix

Que fais-tu là Elie ?

Elie découvre alors un Dieu qui ne contraint en aucune manière et dont le silence lui offre un espace de liberté. Cette voix de Dieu, inaudible et pourtant bien perçue invite Elie à consentir à la présence et à l’agir de Dieu.

C’est cette divine douceur, cette tendresse que maintenant Elie peut entendre.

Quatrième visage : Dieu est là, Dieu silence, Dieu avec Martine.

Amen

 

 

 

À propos de l'auteur

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Alain Rey

Directeur de la publication Hier & Aujourd'hui
Pasteur de l'EPUdF
Études à Montpellier, Berkeley et Genève
Pasteur à Fleury-Mérogis, Mende, au Defap et à la Cevaa

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