Communauté Portraits

Mes deux passions par Jean-Christophe Muller

Qu’il est bon quand on a plusieurs passions de pouvoir donner du temps à chacune !

Être témoin de la disparition d’une culture (celle des Cévennes protestantes), de la désindustrialisation du Bassin Minier des Cévennes, de l’entrée des chars russes à Prague ou la rencontre avec des républicains espagnols, m’ont porté naturellement vers la « res publica » sans besoin de justification scripturaire, sinon par un aller et retour intérieur entre fraternité chrétienne et grande fraternité universelle, et l’idée que se battre pour la vie des territoires ou la dignité de l’être humain avait à voir avec les valeurs évangéliques.

La passion pour les textes bibliques et la prédication, la quête aujourd’hui désabusée d’une Église aux formes renouvelées m’a aussi saisi, mais je savais que ces deux passions se jouaient dans des registres symboliques différents qui ne souffrent pas la confusion, pour une simple raison de crédibilité de chacun de ces modes d’engagement.

Ces deux passions se nourrissent dans mon for intérieur d’un amour pour ma ville d’Alès et pour les Cévennes qui la surplombent. Là, dans l’histoire et le présent, se meuvent mes ancrages au risque de heurts violents avec la dimension universelle de la foi et internationaliste de l’engagement politique.

Élu adjoint au Maire d’Alès à moins de 25 ans, j’ai cessé cette fonction à 37 ans. Comme un professionnel atypique, comme un homme libre qui n’a pas nécessairement besoin d’utiliser les vieilles ficelles que j’ai pourtant apprises. Pouvoir façonner du neuf dans la concertation, l’écoute, de refuser les solutions techniques toutes prêtes pour laisser l’espace délibératif restaurer la politique. J’ai toujours en outre pensé que la transformation sociale passe aussi par la vie associative, l’expérimentation, souvent aujourd’hui instrumentalisées, ce qui démobilise beaucoup de gens.

L’assassinat d’Itshak Rabin m’a fait comprendre qu’il y avait un enjeu politique à la lecture de la Bible : refuser d’en laisser le champ aux littéralistes ! Je suis donc devenu pasteur pour une raison politique, et aussi parce qu’on me posait de plus en plus des questions éthiques sur le sens de la vie. Comme pasteur, je me garde de commentaires locaux, ayant à cœur de valoriser l’engagement d’élus dont je ne partage pas nécessairement les idées parce que je crois que la prédication renvoie chacun à ses convictions et à l’utilité collective.

Analyse politique et lecture évangélique chaque jour s’interpellent en moi, et je n’y ai jamais cherché de cohérence, juste un dialogue sans fin.

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Jean-Christophe Muller

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