Communauté Récits

L’Évangile toujours en excès…

C’est le souci d’être au service de la société qui m’a conduit, après un premier court passage par le ministère pastoral, à répondre à l’opportunité d’un engagement politique en tant que collaborateur d’élus.

Au-delà de l’engagement social et caritatif, il m’est apparu très tôt que servir son prochain passait par le souci d’agir pour des institutions justes, ceci me paraissait en cohérence avec ce que les Évangiles nous racontent du ministère de Jésus: au-delà de gestes individualisés de guérison, de retour à la vie, Jésus a répondu aussi aux attentes de foules nombreuses et il est allé jusqu’à interpeler les pouvoirs politiques et religieux au cœur même de la ville capitale des territoires où il intervenait.

C’est à partir de cet exemple que l’on peut se mettre en quête d’un « évangile intégral » qui résiste à des pouvoirs aliénants et dominateurs qui ne favorisent pas la dignité de l’homme et par-contre répandent l’injustice. A ce propos, il est important de souligner que la justice est une réalité interpersonnelle, il s’agit d’être « bien ajustés » les uns aux autres, sans que des distorsions nuisent au « bien commun ». Annoncer l’évangile c’est aussi œuvrer pour que de bonnes nouvelles surgissent dans des circonstances néfastes.

Ceci-dit, la vocation du chrétien corollairement de l’Eglise, n’est pas d’assumer de manière pérenne le pouvoir. Autant il doit résister lorsque des valeurs fondamentales sont bafouées, autant il doit s’éloigner lorsque ces valeurs sont reprises en compte par ceux avec qui il a combattu pour qu’elles se déploient. L’évangile est toujours en « excès » par rapport à un pouvoir quand bien-même il serait devenu plus juste. Le chrétien est un « dissident impénitent » (Jacques Ellul) et c’est à juste titre qu’un pasteur ne peut pas être au « pouvoir », ni même membre d’un parti dont la raison d’être, même si elle est louable, est de conquérir le pouvoir ; ce qui par-contre ne l’empêche pas d’être le défenseur de causes que certains partis défendent, à qui il peut, et le cas échéant, il doit, apporter son soutien.

En tout état de cause, il doit aujourd’hui particulièrement contribuer par son ministère à lutter contre tous les égoïsmes identitaires, les exclusions nauséabondes, les injustices inacceptables. Il doit rappeler sans cesse que l’humanité est une, que les frontières sont des idoles, de même que les conforts établis et jaloux. Il doit promouvoir le partage inconditionnel des ressources et le respect d’une création donnée pour le bien de tous,   et  il doit, par-dessus tout, se souvenir que l’Eglise est une communauté militante et solidaire, témoin du royaume de bienveillance, de confiance, de paix et de justice qui est venu, qui est là et qui advient par toutes les paroles et tous les gestes de la liturgie à la diaconie, qui s’inscrivent dans un humanisme total dont le Christ a été le serviteur inlassable et victorieux par-delà la croix mortelle qu’il a portée.

Pasteur Jean-Pierre Rive, ancien directeur général de collectivités territoriales

À propos de l'auteur

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Alain Rey

Directeur de la publication Hier & Aujourd'hui
Pasteur de l'EPUdF
Études à Montpellier, Berkeley et Genève
Pasteur à Fleury-Mérogis, Mende, au Defap et à la Cevaa

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