Hommage au pasteur Jacques Maury, mort le 12 avril 2020 à 99 ans
Le Pasteur Jacques Maury, ancien président de la Fédération protestante de France s’est éteint à l’âge de 99 ans.
Président du Conseil national de l’Eglise réformée de France (E.R.F.) de 1968 à 1977, durant trois mandats, il présidera ensuite la Fédération protestante de France pendant dix ans de 1977 à 1987.
Il est également président de la Cimade de 1989 à 1995.
Réformé, homme de foi, il exprimait une triple exigence pour le protestantisme français :
– qu’il affirme l’importance du témoignage évangélique,
– qu’il reste animé d’une vraie conviction œcuménique
– que la lecture de l’Evangile qui est la sienne s’inscrive dans des situations historiques, même difficiles.
Regardant ce brillant parcours qui l’amena à diriger le protestantisme français, Jacques Maury disait néanmoins de lui avec modestie : « J’ai fait toute ma théologie pour être pasteur de paroisse et je n’étais pas destiné à être un homme d’appareil. » Le protestantisme perd en lui un homme de conviction et de courage.
« Je suis très reconnaissant comme beaucoup, envers cet homme que j’ai côtoyé tout au long de mon ministère pastoral » rappelle Francois Clavairoly tout en se souvenant ému qu’il était encore présent à la cérémonie des vœux de la Fédération en janvier 2020, signifiant encore dans sa centième année son réel attachement à l’institution.
La Fédération protestante tient à rendre hommage à ce grand pasteur et adresse à son épouse, ses filles et ses proches ses prières et l’expression de son grand respect et de sa gratitude pour le service rendu au protestantisme Français.
Aude Millet-Lopez
Responsable de la communication de la Fédération Protestante de France
Notice biographique
Le pasteur Jacques Maury est né le 10 novembre 1920 à Clamart (Hauts-de-Seine), fils de Pierre Maury et d’Elisabeth Meyer. Il est le petit-fils de Léon Maury, doyen de la faculté de théologie protestante de Montauban. Son père Pierre fut successivement secrétaire général de la Fédé de 1919 à 1924, pasteur à Ferney-Voltaire de 1925 à 1930, secrétaire général de la Fédération universitaire à Genève de 1930 à 1924, pasteur à la paroisse de Passy-Annonciation à Paris aux côtés de Marc Boegner de 1934 à 1956. Celui-ci sera également professeur à la Faculté de théologie
protestante de paris, de 1943 à 1950 et président de l’Eglise réformée de France de 1950 à 1953 1.
Il épouse Roseline (Juliette) Stoecklin en 1946. Le couple aura six enfants, six filles. Président du Conseil national de l’Eglise réformée de France (E.R.F.) de1968 à 1977, il y effectue trois mandats, après quoi il présidera la Fédération protestante de France pendant dix ans de 1977 à 1987.
Il est scolarisé à l’école primaire à Ferney-Voltaire, puis va au collège Jean Calvin pendant trois ans à Genève.
Il est bachelier en 1937 à Paris, où son père a été nommé en 1934 (paroisse de Poissy) et entreprend des études de philosophie en Sorbonne en 1938, études contrariées par la guerre. Il se rend à Bordeaux où il continue sa licence de philosophie à la faculté des lettres. Il s’inscrit en faculté de théologie à la faculté de théologie protestante de Montpellier où il bénéficie d’une équivalence lui permettant d’entre directement en seconde année.
Il est à Montpellier en 1940 et 1941 et se lie d’amitié avec André Dumas durant ces années universitaires. Il rejoint Genève, où il séjournera quatre mois et fait la connaissance de Robert Martin-Achard et Max Thurian. Au début 1942, il est mobilisé dans les chantiers de Vichy qu’il déserte en 1943. Il restera clandestin jusqu’à la libération de Paris. Pourvu de faux-papiers, il devient suffragant à Montrouge de 1943 à 1944, dans la paroisse du pasteur Albert Finet. A la Libération, il reprend ses études de théologie à la Faculté de théologie de Paris. Il y côtoie Alphonse Maillot, Louis Lévrier, André Lelièvre, Michel Rousseau et Louis Simon, notamment.
Le 10 novembre 1944, il s’engage dans l’Armée du général Leclerc, dont il deviendra aumônier auxiliaire, à la demande de Marc Boegner. C’est en 1946 qu’il achèvera ses études de théologie.
Jacques Maury a été marqué durant toute sa jeunesse par l’Eglise confessante et Karl Barth. Opposée au nazisme, elle fut à l’origine de la déclaration de Barmen en 1934.
Jacques Maury est nommé pasteur pour son premier poste en paroisse à Lezay, dans le département des Deux-Sèvres, où il restera plus d’une dizaine d’années. Après quoi, il est nommé à Paris comme secrétaire général de la Fédération française des associations chrétiennes d’étudiants (FFACE) de 1957 à 1962, sur proposition de Jean Bosc. Il effectue un premier séjour en Amérique latine de novembre 1956 à mars 1957. Il devient, en sa qualité de secrétaire général, membre du Conseil de la Fédération protestante de France. Jacques Maury préside en 1960, lors de l’assemblée générale de la FPF à Montbéliard, le groupe de travail sur l’unité protestante.
Le 5 octobre 1962, un accident prive Jacques Maury d’une jambe. Sa situation est critique. Nommé pasteur à Poitiers, où il exercera de 1962 à 1968, il commence le culte de Noël porté en chaire par ses paroissiens.
Il entre en 1967 au Conseil national de l’Eglise réformée de France. Il est élu président de l’Eglise réformée de France en 1968 et devient, es-qualité vice-président de la FPF. Il est fait chevalier de la légion d’honneur (1968) puis officier (1995). Succédant à Jean Courvoisier, il est élu président de la FPF, fonction qu’il exercera de 1977 à 1987. Comme le soulignera le sociologue Jean Baubérot, le mandat de Jacques Maury s’est inscrit « dans une décennie commémorative », marquée notamment en 1985, par le tricentenaire de la Révocation de l’Edit de Nantes. C’est sous la présidence du pasteur Jacques Maury que se dessine une nouvelle tendance du protestantisme français 2. Il poursuit l’œuvre de son prédécesseur par
l’élargissement à la famille évangélique du nombre des Eglises membres de la FPF. De 1981 à 1990, il co-préside un groupe mixte de travail entre le Conseil œcuménique des Eglises et le Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. Il devient président de la Cimade de 1989 à 1995, soucieux de l’accueil des réfugiés et de la place des migrants dans la société française.
Depuis Clichy où il s’était retiré avec son épouse, Jacques Maury porta toujours un regard attentif aux évolutions du protestantisme contemporain. Réformé, homme de foi, il exprimait une triple exigence pour le protestantisme français : qu’il affirme l’importance du témoignage évangélique, qu’il reste animé d’une vraie conviction œcuménique et que la lecture de l’Evangile qui est la sienne s’inscrive dans des situations historiques, même difficiles.
Regardant ce brillant parcours qui l’amena à diriger le protestantisme français, Jacques Maury dit néanmoins de lui avec modestie : « J’ai fait toute ma théologie pour être pasteur de paroisse et je n’étais pas destiné à être un homme
d’appareil 3. » Le protestantisme perd en lui un homme de conviction et de courage.
Bibliographie :
Bulletin d’information protestante, n°1036 du 17 décembre 1986.
Unité des chrétiens, n° 136, octobre 2004, Entretien avec Jacques Maury.
Frédéric Rognon : Génération Ellul, soixante héritiers de la pensée de Jacques Ellul, Labor et Fides, Genève, décembre 2017.
Entretien de Jacques Maury avec Yves Parrend, jeudi 22 octobre 2015, Clichy-sous- bois.
1 Frédéric Rognon : Génération Ellul, soixante héritiers de la pensée de Jacques Ellul, Labor et Fides, Genève, décembre 2017.
2 La Croix, Sophie de Villeneuve, 24/12/1996.
3 Entretien du 22/10/2015 avec Yves Parrend
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