En voulant éviter un placement à Martine, quels sont les renoncements auxqels tu as dû consentir ?
Je ne ressens pas la situation sous l’angle du renoncement. Je considère que c’est mon travail actuel. Cela me prend cinq heures par jour. Je ne le vis absolument pas comme un renoncement. C’est en fait une manière de revisiter notre histoire commune. Et puis, Martine est toujours adorable. Pour moi c’est certain, tant que Martine sera là, je l’accompagnerai. Je me suis adapté à la situation et je m’adapterai.
Les renoncements que je peux ressentir et vivre, ils sont davantage liés à l’âge. Je ne peux plus, malheureusement, faire tout ce que je faisais.
Comment communiques-tu avec Martine ?
Martine parle énormément, mais c’est vrai qu’elle parle dans une langue qu’on ne comprend pas. On entend la musique mais on ne comprend pas les paroles. En écoutant sa musique, je peux comprendre qu’elle est paisible. De mon côté je lui parle, je lui raconte les choses. Elle m’entend mais elle ne me comprend pas.
Le regard est très important dans la communication. Quand elle ouvre les yeux et qu’elle me voit, elle éclate de rire. Je ne sais si elle me reconnaît, mais je sais que ça la rend heureuse.
Parfois, elle a un éclat de parole très adapté à la situation. Elle peut dire un « merci » très juste.
Aurais-tu un message pour tous ceux qui sont dans la situation d’accompagner et de « prendre soin » ?
Je voudrais dire à tout ceux qui vivent une situation identique de jouir de tout ce qui reste à vivre plutôt que de se lamenter de ce qui a été perdu.
Il y a quelques années, on a vraiment pensé que Martine allait mourir. J’avais fait mon deuil. Et puis, tout s’est à nouveau stabilisé. Le temps qui nous est donné aujourd’hui, est un temps de grâce, un supplément inattendu !
Propos recueillis par Alain Rey
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