On ne peut pas s’intéresser aux personnes âgées sans prendre en compte les pressions qu’elles peuvent subir au sujet de leurs biens, de la part de leurs propres enfants, d’héritiers potentiels ou de faux amis. En tant que pasteur, j’ai parfois été mis devant des situations bien difficiles.
Je pense à ce couple sans enfants très lié à leurs voisins. Ils étaient si gentils qu’Ils leur avaient donné leur maison en héritage. L’affaire était ficelée de telle façon qu’au décès du conjoint sa veuve a dû quitter la maison. C’est en pleurs qu’elle est venue me voir. Les voisins n’ont pas voulu me recevoir.
Je pense à ce vieux garçon célibataire, fils unique, qui à la mort de sa mère m’avait demandé de le conduire chez son notaire. Il avait fait un legs à l’église. Vingt ans plus tard, quelques jours avant son décès, il me raconta que son neveu était allé jusqu’à le menacer pour récupérer sa maison. Il avait dû annuler le legs. Il pleurait.
Je pense à cette retraitée, veuve depuis une dizaine d’année. Son fils, dépendant de l’alcool, venait la racketter le lendemain du jour où elle percevait sa retraite. Il la menaçait s’il jugeait que la somme était insuffisante. Elle avait peur. Sa fille exilée à Paris ne voulait plus aucun contact avec sa famille.
Je pense aussi à cette veuve sans enfant dont la femme de ménage, en fonction depuis peu, s’est fait léguer tous les biens et l’appartement alors qu’elle disait depuis longtemps vouloir les transmettre à une association caritative. Ou encore à ce veuf âgé de 87 ans qui avait tout légué à la sienne moyennant quelques faveurs supplémentaires. Il lui avait déjà donné beaucoup d’argent. Ses enfants ont dû porter plainte. Elle a été condamnée.
Je pourrais citer ainsi plusieurs cas. Des personnes âgées sont harcelées, parfois bousculées par leur proche famille, une parenté plus lointaine ou une connaissance. Le plus souvent, ce sont des femmes. Elles se taisent. Lorsqu’elles confient leur détresse, il est déjà trop tard. A cela il faut ajouter la solitude et un sentiment d’abandon. Ajoutons aussi la sénilité qui, sans être grave comme dans la maladie d’Alzheimer, est à prendre sérieusement en compte. Elle perturbe la lucidité, rend la discussion difficile et parasite les décisions. Un accompagnement de la personne âgée pourrait être mis en place, comme c’est le cas pour les familles avec le suivi d’une assistante sociale ou d’une éducatrice spécialisée. La personne âgée a le droit d’être protégée par des personnes mandatées.
Serge Soulié
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