Le prochain numéro d’Hier & Aujourd’hui, à paraître en décembre prochain, s’intéresse à ce que l’on appelait autrefois « les entreprises nouvelles ». D’abord, est-ce que ce terme convient ?
C’est un terme qui était en effet validé. On a parlé à la fois « d’entreprises » et « d’expériences ». Les deux termes ont été employés.
Je suppose qu’il y a plusieurs documents qui retracent l’histoire de ces entreprises.
Il y a deux documents importants. Il y a d’abord la thèse d’Isabelle Grellier. Elle a fait sa thèse sur les centres protestants de recherche et les expériences nouvelles. Pour réaliser ce travail, elle avait visité un certain nombre d’entreprises. Et puis il y a, à l’initiative de la CGE de l’époque qui était présidée par Georges Crespy, un livre blanc des expériences nouvelles qui avait été constitué par Dora Valayer. Cela a été publié en 1971 dans le Bulletin « Information-Évangélisation ». C’était un livre blanc avec des fiches sur chacun des centres, sur chacune des expériences. Dans ce document, chaque expérience a droit à une page avec un descriptif. C’est un document très intéressant parce qu’on s’aperçoit de la diversité et du nombre de ces expériences.
Ce qui est intéressant dans le regard que tu peux porter sur ces expériences, c’est que tu as été celui qui les a théologiquement analysées avec tes rapports au synode d’Orthez (1963) et au synode de Dijon (1970) mais aussi un acteur avec le centre de recherche du Midi.
J’ai été doublement un acteur. D’abord à Saint-Gaudens par l’orientation prise à partir d’une paroisse très fragile, très petite, qui était un poste d’évangélisation. C’était une orientation vers un travail sur le secteur et déjà avec déjà les caractéristiques d’un centre. C’est dans la suite de ce travail à Saint-Gaudens que j’ai été nommé à l’animation de « Rencontres et Recherches du Midi » qui s’appelait initialement « Recherches et Rencontres Protestantes du Midi ». C’était un Centre avec la particularité de ne pas avoir de lieu contrairement à la plupart des centres – le mot le suggère – qui étaient installés dans des locaux. Il avait d’ailleurs été question un moment que ce centre soit installé à Sommières. Et puis finalement le choix a été fait de ne pas prendre de locaux et d’avoir sur toute la zone Nice-Montpellier des rencontres disséminées en fonction des sujets, des acteurs et des thèmes.
Le centre du Midi fut un des tous premiers centres ?
Non, pas parmi les tous premiers. Le premier historiquement, ça a été, je crois, le centre du Nord, qui était un centre de formation de laïcs. Mais le plus marquant, ça a été Villemétrie, qui a été fondé dès 1954. Sur Villemétrie, il y a eu aussi tout un livre écrit par Pierre Merlet qui a été compagnon de cette aventure. Villemétrie a dû être créé en 1963 ou 65 par André De Robert. Il était très créatif et avait une personnalité très charismatique. Le centre du Midi avait débuté ses activités avant 68, sous la forme de rencontres professionnelles protestantes. Villemétrie avait commencé comme cela aussi, avec des groupes de juristes protestants, de médecins protestants, etc. Dans le midi, cela avait démarré avec Georges Crespy et Michel Wagner qui était, à ce moment-là, pasteur à Aix en Provence. Cela a dû être créé en 1965. Ils ont ensuite créé un poste d’animateur en 1969 et je l’ai occupé à partir de là en tandem avec E. Gourdol..
Le contexte de l’époque n’a-t-il pas favorisé le développement de ces centres ?
En effet, le contexte permet probablement de mieux comprendre la dynamique des centres. Le contexte est celui des années 60. La création des centres va beaucoup intervenir dans le tournant 1960-1970, mais cela s’amorce déjà dans les années 60. Et à ce moment-là, à mon avis, apparaît la conscience d’une sécularisation croissante de la société. On ressent, peut-être pour la première fois depuis la guerre, à quel point la sécularisation s’accentue. Il y a par ailleurs un bouillonnement intellectuel dans la société française qui se traduit par toutes sortes de manifestations.
Mais cela bouge aussi dans l’église ?
Il y a en effet une sorte de feu, de désir assez fort dans certains milieux d’église, d’une nouvelle relation entre l’église et la société. Un élément symbole, mais un élément-clé pour comprendre cette orientation, c’est le rapport que Paul Keller présente en 1966 à l’Assemblée générale du Protestantisme français sur les formes nouvelles d’une relation entre église et société. Toute l’idée du rapport Keller, c’est de dire : l’église, c’est en fait la mission de Dieu pour le monde et cette mission de Dieu pour le monde est à comprendre aujourd’hui en lien avec la société globale. C’est un rapport qui va faire grand bruit ! Cela bouge aussi dans les facultés de théologie, à la veille de 68. À Montpellier, en mars 68, les étudiants sont en grève pour demander que la formation théologique n’ait plus comme seul objectif la formation au ministère pastoral paroissial. Cela bouge aussi avec les mouvements qui s’emparent des questions brûlantes et d’actualité. Les Jeunes Femmes questionnent ouvertement le modèle masculin et patriarcal sur lequel reposent le monde, les pouvoirs, la sexualité.
C’est un bouillonnement généralisé ?
En effet. Pour illustrer ce bouillonnement, je me souviens que Roby Bois, qui était à ce moment-là animateur universitaire à Toulouse, organise en février 68, et la date est importante, trois conférences sous le titre « Une révolution culturelle française ? ». Le point d’interrogation dit tout de ce bouillonnement alors que Viansson-Pontet écrivait au même moment dans le Monde : « La France s’ennuie ». Ce n’était pas vrai ! Partout, il y avait un désir de changement. Les conférences de Toulouse en étaient un des signes. Avec Françis Jeanson comme incroyant, Cardonnel et moi, tous les trois, on a planché à Toulouse, sur la révolution culturelle française qui était alors en gestation !
C’est également une époque de transformation sur le plan de la théologie ?
En effet, et c’est un élément important pour saisir le contexte. Une diversification théologique est en train de s’opérer. On assiste à une sorte de pluralisation théologique. Il y a d’abord la découverte de Bonhoeffer à partir de ses lettres de prison, « Résistance et soumission », en 1963. Les « Lettres de prison », avec l’idée d’un christianisme non religieux et d’un nouveau rapport au monde, ça va jouer beaucoup. Avec Bonhoeffer, il y a aussi Bultmann qui est beaucoup plus ancien mais qu’on découvre un peu à ce moment-là, et puis les théologiens anglo-saxons Robinson, Harvey Cox. Le socle Barthien qui portait l’église réformée se fissure.
C’est donc tout ce contexte de bouillonnement culturel et théologique, qui va favoriser et porter théologiquement la création des centres ?
À mon avis, les expériences nouvelles vont être mues, en effet, par la recherche d’une nouvelle relation entre l’église et la société. Je crois que c’est, au fond, sortir du modèle paroissial pour essayer de trouver d’autres modes, d’autres lieux de relations avec l’environnement. En gros, c’est un courant théologique qui repense les rapports église-monde, un peu dans la ligne du rapport Keller. Louis Simon, de son côté, a beaucoup contribué aussi à cela. Et d’ailleurs les rapports église-monde avaient été sujets de polémique théologique avec Jean Bosc par exemple. Mais en gros, quand même, je crois qu’on était nombreux à rechercher cette autre relation avec le sentiment que d’abord l’église est là pour les autres. Il me semble que fondamentalement, il y avait ça : « une église pour le monde », et ce « pour le monde » va très vite devenir un « avec le monde ».
Cela veut dire que les centres ont eux-mêmes traversé et connu des évolutions ?
Oui, ce qui est intéressant, c’est que pas mal de ces entreprises nouvelles ont été d’abord très différentes et elles ont ensuite évolué. C’est tout un parcours qu’elles ont accompli. Par exemple, le centre du Nord s’était constitué très tôt dans les années 50 comme centre de formation des laïcs. Former des témoins. C’était un peu aussi une idée du Conseil Œcuménique. Il fallait former des communautés et former des communautés, c’était former des hommes et des femmes qui les portent et qui témoignent. Donc il y avait donc là, au début, un objectif de formation. Et puis, cela a évolué. La formation est devenue réflexion critique et le centre du Nord aboutira sous l’impulsion d’Ennio Floris, qui en était l’animateur, à un conflit avec l’ERF parce que certains exposés allaient jusqu’à une forme, je ne dirais pas d’athéisme, mais enfin d’une remise en question des formulations théologiques traditionnelles et même presque au-delà. J’ai vu une évolution pas comparable mais une évolution très nette dans le centre de rencontres du Midi. Alors que te dire ?
Personne n’était alors à l’abri d’une remise en question en profondeur. L’atmosphère était à la déconstruction ?
C’est vrai. Pour ma part, j’ai commencé mon travail à Saint-Gaudens sur la base d’une conception initiale de l’évangélisation qui elle-même a évolué et s’est complètement transformée. D’une vision traditionnelle de l’évangélisation fondée sur la force de l’annonce, je suis venu à la vision plus Bonhoefférienne d’une évangélisation vécue comme écoute et dialogue avec les autres et avec le monde. Deux références ont joué un rôle majeur dans cette évolution, la référence de Villemétrie. C’était un peu notre ainé sur le chemin. Ils avaient des moyens qu’on n’avait pas. Ils avaient des intervenants de qualité du fait de l’implantation parisienne. Ils ont fait tout un travail de recherche et ils ont beaucoup publié. Villemétrie était une référence. La deuxième référence, c’était Riési avec le « Service chrétien » fondé par Tulio Vinay. Il publiait un petit bulletin qui s’appelait « Nouvelles de Riesi » ou quelque chose comme cela. Moi, je m’en suis nourri, tu vois, et c’était la vision d’une petite communauté au service de tout l’environnement. Voilà ! Un service à la fois social, culturel et de formation au bénéfice de tous !
Dans le fond, ce qui caractérise les centres, c’est cette vision de l’évangile vécu comme écoute et dialogue avec le monde ?
Alors moi, je dirais en effet comme toute première caractéristique, une nouvelle relation église-monde. La deuxième caractéristique, c’est le culturel comme lieu de rencontre, c’est-dire non pas qu’on déserte le spirituel, le cultuel, mais on va investir le culturel pour une démarche de recherche, d’investigation, de critique parce que la critique des institutions va jouer fort dans cette période. Au fond, l’idée c’est que cette nouvelle relation avec l’environnement, avec les autres, elle doit se concrétiser sur les questions fondamentales de la société. Aussi bien les questions sociales, politiques, juridiques et on aura un programme, et en particulier les centres, un programme où on aura des réflexions sur les prisons, la justice, l’école, sur la santé, etc.
L’évangélisation quitte le terrain de l’annonce seule et se comprend désormais davantage comme une écoute, un dialogue, une dynamique de recherche et de rencontre ?
Oui, tout à fait et c’est intéressant de voir que c’est la commission d’évangélisation qui va piloter les expériences nouvelles. Ce n’est pas par hasard que ce soit la commission d’évangélisation ! Cela veut dire que c’est un nouveau regard sur l’évangélisation comprise comme une forme de partage avec les autres, qu’ils soient croyants ou pas.
Ça a bousculé la vision traditionnelle, barthienne de l’évangélisation ?
Oui, il y a eu des tensions parce qu’il y avait deux modèles, la paroisse et le modèle du centre qui étaient quelquefois en opposition. Il faut dire qu’il y a eu des conflits assez vifs alors, pour le centre de l’Ouest. Le Centre Protestant de l’Ouest (CPO) est significatif de ces évolutions parce qu’il est né de l’initiative de Jacques Maury et de quelques autres lors d’un rassemblement protestant de l’Ouest dans les années 50 où on se dit qu’est-ce qu’on va faire ? Qu’est- ce qu’on peut faire ensemble ? On va faire un centre pour réfléchir aux grandes questions et puis ce centre va évoluer avec Charpié, son animateur, à partir de quoi naîtront des positions de critique radicale non seulement de l’Église mais du Crédo et du « kérygme » lui-même. Le christianisme non religieux de Bonhoeffer était porté dans une telle radicalité que l’on pouvait se demander si c’était encore du christianisme ? Et en même temps, c’était l‘audace de ces centres que de vivre une démarche critique qui interroge le cœur de la foi. Il est vrai qu’en même temps, cela remettait en question les institutions.
Et tu dis bien que, au départ, l’enjeu premier de cette évangélisation nouvelle c’était la culture. Interroger la culture comme lieu d’un possible dialogue avec le monde ?
Alors ça me semble être une constante. Dans l’évolution de ces entreprises, il me semble que la constante c’est la culture comme lieu de débat, lieu de rencontre. Lorsqu’on faisait un débat ou un week-end sur les prisons par exemple, on le faisait avec des magistrats, des avocats, des anciens détenus, avec des gardiens de prison, avec tous les acteurs et donc on retrouvait une autre relation, la relation d’hommes et de femmes confrontés à la tâche d’édifier une société et où comme chrétiens on a le sentiment d’avoir quelque chose à partager, beaucoup à recevoir mais que peut-être à travers ce qu’on va recevoir on va découvrir aussi des aspects méconnus de notre propre message. Donc on passe de ce que tu appelais l’annonce au partage et je dirais même à la redécouverte de ce qui nous fonde nous-même. En tout cas c’est comme cela que moi je l’ai vécu.
Et cela a été vécu dans tous les centres ?
Il y a eu des différences parmi les centres. Ce qui a été assez intéressant, c’est que tu avais les centres régionaux et tu avais des centres locaux, par exemple à Versailles, à Bordeaux, à Pau ou à Bois-Colombes. Alors Pau, je l’ai vécu de très près parce que à Pau, ils avaient le projet de construire un second temple. Le conseil presbytéral décide : alors on va construire un second temple parce que la ville s’étend et il y a maintenant une faculté, une université. Donc on construit un second temple, on achète un terrain. Bon ! Et puis il y a des gens de Pau qui viennent à St Gaudens et parmi ceux-là, deux amis, deux conseillers presbytéraux voient ce qu’on est en train de vivre. Ils retournent à Pau et disent : « Non ce n’est pas un temple qu’il faut construire ici ! Il nous faut construire autre chose, un centre de rencontres ». Le reste du conseil presbytéral disait « bof ». Ils m’invitent un soir pour aller parler de ce qu’on vivait et ils décident de construire le centre de Pau ! Et ils construisent un centre qui va être animé par Roby Bois et puis ensuite par Jean-François Zorn. C’est un centre qui aura un rôle majeur dans la ville, y compris dans les élections municipales. Et vraiment, cela a été un des lieux de rayonnement de l’Église pendant 20 ans. Extraordinaire à Pau ! Avec Roby Bois comme avec Jean-François, le souci théologique était présent, tu vois, et pas seulement une sécularisation du projet mais c’était un projet profondément théologique mais dans sa nouveauté.
Parce qu’il y avait là des acteurs, des leaders qui savaient maintenir le cap ?
Là, tu touches un point très sensible, c’est le rôle des animateurs. Dans la plupart de ces entreprises nouvelles, il y a eu des animateurs charismatiques, convaincus d’une évolution nécessaire et suffisamment forts pour tenir des objectifs. Parce qu’il est vrai que ces entreprises fonctionnaient en auto gestion. C’était une nouvelle conception de la responsabilité collective. L’autogestion de l’entreprise conduisait à des situations où les acteurs n’étaient plus des protestants faisant des choses pour les autres mais conjointement des protestants, des cathos, des incroyants qui, dans leur diversité, portaient le projet. Tu vois, à Pau, par exemple, il y a eu des gens venant de « Vie Nouvelle ». Ils ont porté le projet dès le début. À Rencontres et Recherches du Midi, au début c’était une équipe entièrement protestante qui était autour de moi, quand j’ai quitté, c’était une équipe où il y avait une grande diversité, y compris une dominicaine qui en faisait partie avec les protestants ! Alors le lien avec le protestantisme était marqué par l’animateur qui était en général un pasteur, une partie du financement, une partie importante et puis le programme, les activités, les animations étaient autogérées dans une équipe pluraliste.
C’est une richesse pour ces entreprises d’avoir pu compter sur des animations de type charismatique mais c’est aussi une fragilité parce que cela conduit inévitablement à une forme de personnalisation de l’entreprise, non ?
Cela a été souvent le cas. Tu vois, par exemple – je ne l’ai pas suivi de près – mais le Grenier de Sarcelles- c‘était Esposito Farèse et avec les talents qui étaient les siens… il a fait quelque chose à Sarcelles qui était très original. Dans d’autres lieux, à Versailles, il y avait Martine Millet, Claudette Marquet, Louis Schloesing. Il y a eu des personnalités comme ça ! À Villemétrie, c’était De Robert. Villemétrie a été très original parce que ça a été un centre mais il y avait une communauté de prières et ça c’était unique dans les centres. Une communauté de prières quotidienne que De Robert avait réunie autour de lui (4 ou 5 personnes). Il y avait un office et du coup lors des rencontres, le lien entre les débats et la spiritualité s’opérait sans problème. Les centres étaient marqués par la personnalité de l’animateur.
La question qu’on se pose aujourd’hui, c’est en quoi ces centres ont-ils ensemencé la vie de l’Église ? Quelle trace de cette histoire dans la vie de l’Église aujourd’hui ?
Question difficile parce que ce qui est frappant, c’est que ces expériences nouvelles ont été éphémères ! Cela a duré 20 ans et là on peut se poser la question : pourquoi ? Qu’est ce qui explique que ces expériences dans lesquelles l’Église avait beaucoup investi aient disparu en quelques années ? Je vois trois réponses possibles. La première viendrait de ce que c’est la société qui a changé. Dans ce cas-là on pourrait penser qu’elles ont correspondu à un moment, à un Kaïros autour de 68, avant et après 68. Il y aurait eu quelques années où une sorte de rencontre église-monde, une rencontre entre des aspirations dans l’église et des aspirations dans la société, se seraient cristallisées dans ces expériences. C’est une réponse possible. Cela a correspondu à un Kaïros et aujourd’hui l’église a changé mais surtout la société a changé et ce n’est peut-être plus sous cette forme-là que l’on peut imaginer une rencontre avec les autres, avec ces autres qui sont absents de nos paroisses. Je ne suis pas sûr de cette réponse mais je la mentionne parce que c’est une réponse possible !
Une autre réponse, c’est de dire que ces centres correspondaient à une forme de sécularisation interne de l’église et que cette sécularisation interne a conduit un certain nombre des animateurs et de participants à perdre le lien avec l’église. Qu’il y ait un certain aspect de sécularisation interne, je le crois ! Mais peut-on dire pour autant que ces entreprises ont disparu parce que cette sécularisation s’est accentuée jusqu’à perdre tout intérêt pour l’Évangile et tout lien avec la foi ? J’en suis moins sûr ! Il y a peut-être de ça ! Mais bon.
Il y a une troisième réponse, je me demande en effet si l’Église ne se serait pas rétrécie et si nous n’avons pas perdu la vision d’un monde à construire avec d’autres et dans lequel les chrétiens s’impliqueraient ?
Aurait-on perdu la vision d’une Église pour le monde ?
Pour moi, l’expression « Église de témoins » est en effet ambiguë. Elle semble réduire la communauté chrétienne à ses membres confessants et par conséquent à oublier tous ces liens qu’on peut avoir avec ceux qui cherchent, qui s’interrogent, qui ne sont pas des croyants, qui ne sont pas des incroyants non plus, mais qui composent la nébuleuse que nos paroisses pourraient rencontrer. Petit à petit, nos régions se sont amputées de ces ministères autres. Il y avait un souffle, il y avait une dimension d’utopie. Il y avait un réseau paroissial qui, même à travers des rapports parfois conflictuels avec les entreprises, était un réseau paroissial porteur. Aujourd’hui, on peut se demander si le réseau paroissial ne serait pas menacé de se replier sur le souci de sa survie ?
Propos recueillis par Alain Rey
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