Céline Rohmer est professeur de Nouveau Testament à la Faculté de théologie de Montpellier. Lorsque nous l’avons rencontrée en juin dernier, elle rentrait du synode national où elle avait été liturgiquement installée dans son ministère d’enseignante à la Faculté de théologie de Montpellier : « Participer à la formation des pasteurs de notre Église, c’est une chose dont je suis extrêmement fière. Être envoyée par le synode pour former des théologiens parmi lesquels l’Église discernera ses envoyés, c’est une belle responsabilité et j’en suis immensément honorée« .
Céline Rohmer se définit avant tout comme pasteur : « J’ai été et je suis un pasteur heureux. La paroisse c’est fantastique. Je le crois vraiment ! J’ai reçu l’Évangile dans une vie d’Église. C’est là qu’il s’est passé quelque chose dans ma vie« . Elle a commencé son ministère dans le Gard, à Vergèze. Elle fut alors, à 24 ans, parmi les plus jeunes femmes pasteurs nommées dans l’Église réformée. Ce furent six années-bonheur : « On a vécu de tout. Des bagarres de conseils, des fâcheries, mais on a vraiment vécu ensemble de très belles choses. J’en garde un merveilleux souvenir. Je souhaite à tout le monde ce genre de premier poste. Ce qui me plaisait, c’était cet aspect généraliste : faire des visites, animer une école biblique avec les enfants, préparer un mariage, se retrouver le dimanche et vivre ensemble un culte autour des Écritures, etc. C’était vraiment une vie de communauté et c’est vraiment ça qui me portait« . Tous les ministères qui lui ont été confiés par la suite, à Théovie, à l’IPT dans la mise en place de l’enseignement à distance ou ensuite comme enseignante à la Faculté de théologie, elle n’a pu les accepter que parce qu’ils étaient en cohérence avec sa vocation pastorale. « La recherche pure me passionne mais ce n’est pas ça qui me fait vivre. J’ai vraiment été appelée au ministère pastoral. C’est une vocation. Si je ne peux plus répondre à cette vocation, alors je préfère faire autre chose« . Être enseignante aujourd’hui, c’est pour Céline Rohmer une autre façon d’être pasteur, une autre manière d’être pleinement dans le ministère pastoral. Une manière qui n’abandonne aucune des questions concrètes issues de la catéchèse, de la visite, de la prédication, de l’accompagnement des personnes et des familles, mais qui reprend l’ensemble de ces questions pour les soumettre au crible d’un questionnement exigeant. « L’enseignement c’est le lieu idéal pour témoigner qu’il n’y a pas de foi sans intelligence de la foi. L’intelligence de la foi, c’est une façon de témoigner de la profondeur de sa foi. Pour moi, Dieu appelle si fort qu’il faut lui répondre de tout son être. Avec intelligence, nous devons lui répondre aussi fortement qu’il nous appelle. C’est ça mon travail aujourd’hui et je trouve qu’il est en pleine cohérence avec ma manière de répondre à Christ« .
Cette intelligence dont parle Céline Rohmer, elle l’a mise au service de la compréhension des paraboles chez Matthieu. Elle a une formation initiale en Lettres classiques. Avant de s’engager dans un parcours théologique, elle aurait voulu être journaliste. Les Lettres pouvaient ouvrir ce chemin. Elle aime la littérature. Ça fait partie de sa vie. Le récit, la narration, c’est une chose autour de laquelle elle s’est construite. Elle aime qu’on lui raconte des histoires. Du coup, elle s’est toujours interrogée sur le fait que Jésus puisse prendre du temps pour raconter des histoires. Elle a voulu savoir et puis l’interprétation moralisante que l’on fait souvent des paraboles ne la satisfaisait pas. Son directeur de recherches, Élian Cuvillier, l’a poussée dans cette voie. Elle s’est alors mise à creuser un sillon de recherches autour des paraboles qui l’a conduite jusqu’à une thèse double sceau, reconnue à la fois par l’Université et par l’IPT. Cette double reconnaissance est aujourd’hui une aide considérable dans l’enseignement de Céline Rohmer. Cela lui permet d’établir des passerelles extrêmement fructueuses avec des enseignants de l’Université Paul Valéry. L’un d’entre eux, septantiste reconnu, vient enseigner le grec de la Septante aux étudiants de la Faculté de théologie. Des séminaires interdisciplinaires sont également organisés où se croisent des réflexions autour de la Bible, de la Littérature et de la Psychanalyse. C’est une immense richesse pour tous.
Céline Rohmer est une personne chez laquelle on sent tout à la fois une forte conscience de la responsabilité, le poids de la rigueur et de l’exigence, une fidélité à une cohérence intérieure, un appétit joyeux d’être et de vivre. On pourrait également l’appeler du beau nom de « Gratitude » tant le mot « reconnaissance » vient si souvent rencontrer son propos. Elle est en effet reconnaissante d’être pasteur ; reconnaissante d’être aujourd’hui pasteur-enseignante ; reconnaissante d’avoir grandi dans un milieu familial où le rapport à la foi était heureux ; reconnaissante d’avoir connu une rencontre, une conversion, au cours d’une prédication ; reconnaissante de pouvoir trouver sa place dans une chaîne de témoins. C’est en effet dans cet esprit qu’elle vient nous rencontrer à Sète : » Je suis contente de venir. Je suis le fruit de votre travail à vous. C’est une chaîne et c’est une immense chance que de se reconnaître dans cette chaîne-là…« . Alain Rey
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