Les pasteurs au cours de leur ministère, ont eu l’occasion dans les synodes, les pastorales ou dans les conseils presbytéraux de s’interroger sur ce qu’est un pasteur. L’imagination ne manquait pas. Pour les uns il est animateur, pour d’autre orateur, parfois un réparateur d’âme… et bien d’autres choses encore. Je me souviens d’une pastorale ou durant tout un weekend, l’intervenant a présenté le pasteur comme un « animal théologique ». Ayant grandi dans une ferme, la pastorale terminée, je me précipitai dans étables et écuries pour voir lequel des animaux était le plus théologien. L’âne se mit à braire, le bœuf à beugler, le mouton à bêler. On se serait cru dans une crèche. Je me dis qu’en effet, le BA BA de la théologie était bien là. Je ne pus m’empêcher de faire un saut à la basse-cour. Le coq se mit à chanter, le pigeon à roucouler. Nul doute, tous ces animaux avaient bien été initiés à la théologie. Chacun avait trouvé sa place dans l’Evangile.
Je me penchais sur moi-même pour mieux connaitre ce que j’avais été durant toutes ces années de ministère pastoral. Je vis alors défiler des hommes et des femmes libérés de l’alcool, des sortants de prison réinsérés, des couples s’aimer à nouveau, des femmes heureuses d’avoir pu enfin choisir leur vie. J’en concluais que j’avais été un « passeur ». Toutes ces personnes étaient passées d’une situation difficile à une plus heureuse. Un bon passeur bien sûr parce qu’il y a les mauvais. Ceux qui encaissent beaucoup d’argent pour livrer à la mer, sur une vieille barque, des milliers de personnes, ceux qui font des tours de passe-passe pour rouler les plus naïfs dans la farine ou encore ceux qui vous aident à passer la frontière avec drogues et produits interdits.
Je revins à mon film. Le défilé ne s’arrêtait pas. Tous ceux que j’avais rencontrés étaient là. Je compris que ceux que j’avais crus en bonne santé, mentale et physique, étaient, eux aussi passés d’un état à un autre. J’avais donc était un passeur sans le savoir ! Tous passaient plusieurs fois. Chaque passage signifiait une nouvelle vie. Soudain je me vis dans le défilé. Je marchais avec les autres, je passais et repassais. Aurai-je était un passeur pour moi-même ? Nous paraissions tellement heureux d’être ensemble. Aucun ne se prévalais d’avoir fait passer l’autre. J’en concluais que nous avions tous étés des passeurs les uns pour les autres. Peu importe que nous soyons pasteur, animateur, psychologue, réparateur, chacun à un moment donné de sa vie a permis à l’autre de passer d’une situation donnée à une situation nouvelle.
Je me suis alors souvenu de Pâques qui selon sa racine hébraïque veut dire passage. Passage de l’Egypte à la terre promise comme une immigration, passage d’une vie étouffante à la liberté comme la dépendance vaincue, passage de la mort à la vie comme pour Jésus, le Christ de ma vie.
Serge Soulié
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